La retraite progressive dès 60 ans : une nouvelle étape pour les salariés et les entreprises

Qu’est-ce que la retraite progressive dès 60 ans ?

Depuis le 1er septembre 2025, la retraite progressive est accessible à tous les assurés dès 60 ans, sous réserve de totaliser 150 trimestres. Ce dispositif, qui combine activité à temps réduit et perception partielle de la pension, devient un outil majeur de gestion des fins de carrière.

Points essentiels à retenir :

  • ✅ Âge d’accès abaissé à 60 ans, quelle que soit l’année de naissance.
  • ✅ Condition : justifier d’au moins 150 trimestres d’assurance validés.
  • ✅ Ouvert à tous les régimes (salariés, indépendants, professions libérales, avocats).
  • ✅ Silence de l’employeur pendant 2 mois = acceptation tacite de la demande.

Comprendre la réforme de la retraite progressive

Le décret n° 2025-681 du 15 juillet 2025, publié au Journal officiel du 23 juillet 2025, modifie en profondeur l’accès à la retraite progressive. À compter du 1er septembre 2025, tous les assurés totalisant au moins 150 trimestres d’assurance pourront demander à bénéficier de ce dispositif dès l’âge de 60 ans, sans considération de leur année de naissance.

Jusqu’alors, la retraite progressive était réservée aux salariés remplissant les conditions de durée d’assurance et ayant atteint un âge fixé à « l’âge légal de départ à la retraite minoré de deux ans ». Concrètement, pour les assurés nés à compter de 1968, cela correspondait à 62 ans. Le passage à 60 ans marque donc une rupture notable, en ouvrant le dispositif de manière plus précoce et universelle.

Cette mesure s’inscrit dans la continuité de l’accord national interprofessionnel du 14 novembre 2024, conclu en faveur de l’emploi des salariés expérimentés. L’objectif est clair : encourager le maintien en activité des seniors grâce à une transition progressive entre emploi et retraite, évitant ainsi les arrêts brutaux de carrière.

Le cadre légal de la retraite progressive

Les textes applicables

Le dispositif de retraite progressive est prévu à l’article L. 161-22-1-5 du Code de la sécurité sociale. Le décret de juillet 2025 modifie l’article D. 161-2-24 du même code, en remplaçant la référence à « l’âge légal abaissé de deux ans » par une formule simple : « 60 ans ».

Ce changement de rédaction n’est pas anodin : il uniformise le dispositif et met fin à la complexité liée à l’évolution de l’âge légal. Désormais, quel que soit l’âge légal applicable à la génération concernée, la retraite progressive sera accessible à partir de 60 ans.

Les conditions à remplir

Pour prétendre à la retraite progressive, deux conditions demeurent incontournables :

  • Durée d’assurance : justifier d’au moins 150 trimestres validés.
  • Activité à temps partiel ou réduit : le salarié doit exercer une activité dont la durée correspond à un temps partiel compris entre 40 % et 80 % de la durée légale ou conventionnelle de travail.

Le dispositif concerne un large public : salariés du régime général, non-salariés et salariés agricoles, professions libérales, avocats en droit du travail, ainsi que les affiliés à certains régimes spéciaux par le biais du décret parallèle n° 2025-680 du 15 juillet 2025.

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Le fonctionnement de la retraite progressive

Une logique de cumul emploi-retraite

La retraite progressive permet de percevoir une fraction de sa pension de retraite de base et complémentaire tout en continuant à exercer une activité professionnelle. Le salarié voit donc ses revenus composés d’une part de salaire (réduit) et d’une part de pension.

Le pourcentage de pension versée dépend de la quotité de travail effectuée. Plus la durée de travail est réduite, plus la part de retraite versée est élevée. Par ailleurs, les trimestres continuent d’être validés, ce qui permet d’améliorer le montant de la pension définitive lorsque le salarié liquidera ses droits à taux plein.

Coordination avec les régimes complémentaires

Le régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco s’aligne sur le dispositif de retraite progressive tel que prévu par le Code de la sécurité sociale. Concrètement, un salarié bénéficiant de la retraite progressive dans le régime de base percevra également une fraction de ses droits complémentaires, ce qui rend le dispositif attractif pour les cadres et assimilés.

Les droits et obligations des employeurs

L’acceptation tacite en cas de silence

Lorsqu’un salarié remplit les conditions légales et sollicite un passage en retraite progressive, l’employeur dispose d’un délai de deux mois pour répondre. Son silence vaut acceptation. Seule une incompatibilité objective de la demande avec les nécessités économiques de l’entreprise peut justifier un refus.

Le refus doit impérativement être motivé et notifié par lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai de deux mois. À défaut, l’accord est réputé acquis.

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Un régime encore plus contraignant à venir

Le projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel de 2024 prévoit de durcir encore ce régime. À l’avenir, un employeur qui souhaiterait refuser une demande de retraite progressive devrait apporter une justification circonstanciée, démontrant :

  • l’impact de la réduction du temps de travail sur la continuité de l’activité de l’entreprise ;
  • les éventuelles difficultés de recrutement induites pour compenser la baisse d’activité de l’intéressé.

Ce renforcement traduit une volonté politique d’encourager fortement le recours à la retraite progressive et de limiter les marges de manœuvre des employeurs.

Les enjeux pratiques pour les salariés et les entreprises

Pour les salariés : une transition progressive vers la retraite

La retraite progressive constitue un outil de souplesse pour les actifs proches de la retraite :

  • elle permet d’adapter progressivement le rythme de travail,
  • elle offre une sécurité financière en combinant pension partielle et rémunération,
  • elle donne la possibilité de continuer à accumuler des droits à retraite, améliorant le montant futur de la pension.

Cette transition est particulièrement adaptée aux salariés dont les métiers sont physiquement ou psychologiquement exigeants, mais qui souhaitent rester en activité partielle pour transmettre leur savoir-faire.

Pour les entreprises : un outil de gestion des fins de carrière

Pour les employeurs, la retraite progressive présente plusieurs avantages :

  • elle facilite la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ;
  • elle permet un transfert progressif des savoirs et compétences entre générations ;
  • elle limite les départs brusques qui fragilisent l’organisation.

En contrepartie, l’employeur doit gérer la réorganisation du travail et, le cas échéant, procéder à un recrutement partiel. Les contraintes organisationnelles sont donc réelles, mais elles sont désormais moins reconnues comme motifs légitimes de refus.

Un dispositif encore trop peu utilisé en France

Malgré ses atouts, la retraite progressive reste marginale : seuls 0,5 % des départs à la retraite passent par ce dispositif. Plusieurs raisons expliquent ce faible recours :

  • une méconnaissance du dispositif, tant par les salariés que par les employeurs ;
  • une complexité administrative et des démarches parfois dissuasives ;
  • une incertitude sur le calcul exact de la pension finale.

En comparaison, d’autres pays européens utilisent largement ce type de transition, ce qui souligne le retard français en matière de gestion des fins de carrière.

Conseils pratiques pour anticiper une demande de retraite progressive

Pour les salariés

  • Vérifier le nombre de trimestres validés afin de s’assurer de remplir la condition des 150 trimestres.
  • Évaluer, avec un simulateur de pension, l’impact de la retraite progressive sur la pension finale.
  • Anticiper la demande auprès de l’employeur et préparer un projet de réduction du temps de travail cohérent avec les besoins du service.

Pour les employeurs et services RH

  • Mettre en place un processus interne de traitement des demandes afin de respecter le délai légal de deux mois.
  • Étudier en amont l’organisation du travail pour évaluer les conséquences d’un passage en retraite progressive.
  • Formaliser toute décision de refus dans les formes requises et sur des bases objectives pour éviter un contentieux.

Un équilibre entre droits individuels et intérêt collectif

La retraite progressive dès 60 ans constitue une avancée sociale majeure, en offrant aux salariés une transition souple et sécurisée vers la retraite. Elle s’impose également comme un outil de gestion RH moderne, permettant aux entreprises de mieux accompagner les fins de carrière.

Toutefois, cette réforme accroît les obligations des employeurs et réduit leurs marges de manœuvre. Le régime de refus, déjà strict, devrait encore se resserrer. Dans ce contexte, il est essentiel pour les dirigeants d’anticiper les demandes et pour les salariés de se préparer soigneusement.

L’assistance d’un avocat en droit du travail permet d’accompagner chaque partie dans la mise en œuvre du dispositif, de sécuriser les procédures et de prévenir les litiges. Plus que jamais, la retraite progressive devient un enjeu stratégique, à la croisée des intérêts individuels et collectifs.

FAQ sur la retraite progressive dès 60 ans

Quelles sont les conditions pour bénéficier de la retraite progressive en 2025 ?

À partir du 1er septembre 2025, la retraite progressive est accessible dès 60 ans pour tous les assurés justifiant d’au moins 150 trimestres d’assurance. Il faut également exercer une activité à temps partiel ou réduit, comprise entre 40 % et 80 % de la durée légale ou conventionnelle de travail.

Qui peut demander la retraite progressive ?

Le dispositif concerne l’ensemble des assurés : salariés du secteur privé, salariés et non-salariés agricoles, professions libérales, avocats, ainsi que certains régimes spéciaux. Le régime complémentaire Agirc-Arrco applique également la retraite progressive dès lors que les conditions sont remplies dans le régime de base.

L’employeur peut-il refuser une demande de retraite progressive ?

Le principe est l’acceptation : le silence de l’employeur pendant 2 mois vaut accord. Le refus n’est possible que si la réduction du temps de travail est incompatible avec l’activité économique de l’entreprise. Ce refus doit être motivé et notifié par lettre recommandée avec accusé de réception.

Comment est calculée la pension en retraite progressive ?

Le salarié perçoit une fraction de sa pension de retraite de base et complémentaire proportionnelle à la réduction de son temps de travail. Plus la durée de travail est faible, plus la fraction de pension est élevée. Pendant la période de retraite progressive, le salarié continue d’acquérir des droits qui amélioreront sa pension définitive lors de la liquidation totale.

Quels sont les avantages de la retraite progressive pour les entreprises ?

La retraite progressive facilite la gestion des fins de carrière. Elle permet de maintenir en poste des salariés expérimentés tout en favorisant la transmission des compétences. Elle contribue à une meilleure gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, tout en offrant une transition plus douce que le départ en retraite brutal.