Comprendre les motifs de licenciement pour faute grave
Tout comprendre des motifs de licenciement pour faute grave
Définition : faits imputables au salarié rendant impossible son maintien, même pendant le préavis (art. L1232-1, principe ; Cass. soc., 27-09-2007).
Motifs types : absences injustifiées/abandon de poste, insubordination, violences/injures, harcèlement (L1152-1, L1153-1), vol/fraude, ivresse en service.
Conséquences : rupture immédiate, sans préavis ni indemnité de licenciement (art. L1234-5) ; congés payés acquis dus ; droit au chômage conservé.
Procédure : convocation, entretien préalable, lettre motivée et délais légaux (arts. L1232-2 à L1232-6 ; mise à pied conservatoire possible).
Recours : contestation devant le conseil de prud’hommes (L1471-1) ; contrôle de la réalité, gravité et proportionnalité ; requalification et indemnisation possibles.
Le licenciement pour faute grave est l’une des sanctions disciplinaires les plus sévères du droit du travail. Il met fin immédiatement au contrat de travail lorsqu’un salarié adopte un comportement rendant impossible son maintien dans l’entreprise, même pendant la durée du préavis.
Encadré par le Code du travail et interprété strictement par la Cour de cassation, il suppose des faits précis, établis et d’une gravité suffisante pour rompre la confiance entre l’employeur et le salarié.
L’objectif est clair :
protéger l’entreprise lorsqu’un salarié manque gravement à ses obligations,
garantir au salarié une procédure équitable et une décision fondée sur des éléments objectifs.
Qu’est-ce qu’une faute grave en droit du travail
La faute grave se définit comme un acte ou un comportement du salarié rendant impossible la poursuite du contrat de travail. Selon la Cour de cassation, elle « résulte de faits imputables au salarié d’une gravité telle qu’ils rendent impossible son maintien dans l’entreprise » (Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43.867).
Elle ne peut être prononcée qu’en cas de cause réelle et sérieuse, conformément à l’article L1232-1 du Code du travail.
En d’autres termes, il ne s’agit pas d’une faute légère ou d’un simple désaccord : la faute grave suppose une violation manifeste des obligations contractuelles ou des règles essentielles de la vie professionnelle.
Faute grave : justifie la rupture immédiate sans indemnité de licenciement ni préavis (art. L1234-5 du Code du travail).
Faute lourde : implique une intention de nuire à l’employeur, entraînant la perte des congés payés.
Le rôle du juge dans l'appréciation de la gravité de la faute commise par le salarié
La gravité de la faute est toujours appréciée au cas par cas par le conseil de prud’hommes. Le juge examine notamment :
les circonstances précises du comportement,
le poste occupé et le niveau de responsabilité,
les antécédents disciplinaires,
et les conséquences sur le fonctionnement de l’entreprise.
Le licenciement doit reposer sur des preuves tangibles : rapports, témoignages, mails, vidéos ou avertissements antérieurs. Sans preuve concrète, la rupture peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les principaux motifs pouvant justifier un licenciement pour faute grave d'un salarié
Certains comportements sont reconnus de manière constante par la jurisprudence comme constituant une faute grave, car ils traduisent une atteinte à la loyauté ou à la sécurité dans l’entreprise.
Absences injustifiées et abandon de poste
Une absence non autorisée et prolongée, ou un abandon de poste, désorganisant le service, est une faute grave. Cass. soc., 16 juin 1998, n° 96-43.706 : la Cour confirme que le salarié qui quitte son poste sans motif valable peut être licencié immédiatement.
Insubordination ou refus d’exécuter une consigne légitime
Le refus d’obéir à un ordre hiérarchique légitime constitue une faute grave, notamment lorsqu’il s’agit d’une règle de sécurité. Cass. soc., 9 mars 2011, n° 09-70.619 : un salarié refusant de porter des équipements de protection peut être licencié pour faute grave.
Violences, menaces et injures
Les propos insultants, les menaces ou les gestes violents envers un supérieur, un collègue ou un client rendent impossible la poursuite du contrat. Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43.867 : les violences sur le lieu de travail constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Vol, fraude ou détournement de matériel
Le vol d’un bien appartenant à l’entreprise, même de faible valeur, ou la falsification de documents internes, est un motif de rupture immédiate. Cass. soc., 26 févr. 1991, n° 88-43.120 : le vol caractérise une rupture du lien de confiance.
Harcèlement moral ou sexuel
Tout comportement portant atteinte à la dignité ou à la santé d’un salarié relève de la faute grave, voire de la faute lourde. Les articles L1152-1 et L1153-1 du Code du travail prohibent ces agissements, susceptibles d’engager la responsabilité civile et pénale de leur auteur.
État d’ivresse ou usage de stupéfiants sur le lieu de travail
Un salarié en état d’ivresse pendant son service, surtout sur un poste à risque, peut être licencié pour faute grave. Cass. soc., 22 mai 2002, n° 00-45.963 : l’état d’ébriété compromettant la sécurité justifie la rupture immédiate.
Divulgation d’informations confidentielles
La violation du secret professionnel ou des données stratégiques de l’entreprise constitue une faute grave. Elle rompt l’obligation de loyauté prévue par l’article L1222-1 du Code du travail.
Les fautes graves spécifiques à certaines fonctions
Cadres et cadres dirigeants
Leur position hiérarchique implique un devoir renforcé de loyauté et de vigilance. Sont considérées comme fautes graves :
les abus d’autorité,
la gestion fautive mettant l’entreprise en péril,
ou la violation d’obligations de confidentialité.
Salariés en contact avec le public
Les comportements inadaptés vis-à-vis des clients, l’irrespect des règles de service ou les injures au public constituent des fautes graves.
Secteurs réglementés : santé, éducation, banque
Le non-respect des protocoles légaux ou déontologiques (sécurité, secret professionnel, données personnelles) est particulièrement sanctionné.
Les conséquences d’un licenciement pour faute grave
La faute grave a des effets immédiats et irréversibles sur la relation de travail.
Rupture immédiate du contrat
Le salarié quitte l’entreprise dès notification du licenciement. Aucun préavis n’est exécuté ni indemnisé.
Perte des indemnités de licenciement
Conformément à l’article L1234-5 du Code du travail, la faute grave prive le salarié de :
l’indemnité de licenciement (légale ou conventionnelle),
l’indemnité compensatrice de préavis.
Seuls les congés payés acquis et les primes dues au jour de la rupture doivent être versés.
Maintien des droits sociaux
Malgré la sévérité de la mesure, le salarié licencié pour faute grave conserve :
le droit à l’assurance chômage (France Travail, ex Pôle emploi),
la possibilité de faire valoir son expérience professionnelle auprès d’un futur employeur,
et le droit de contester la décision devant le conseil de prud’hommes.
La procédure de licenciement pour faute grave
L’article L1232-1 du Code du travail prévoit que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse et respecter une procédure contradictoire.
Mise à pied conservatoire
Elle est possible lorsque la présence du salarié dans l’entreprise est incompatible avec la poursuite de l’activité. Cette mesure n’est pas une sanction mais une suspension provisoire du contrat, dans l’attente de la décision finale. Cass. soc., 12 mars 2002, n° 00-44.185 : la mise à pied conservatoire ne peut précéder qu’une sanction grave et définitive.
Convocation à l’entretien préalable
L’employeur doit convoquer le salarié par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre. La convocation mentionne :
la date, l’heure et le lieu de l’entretien,
l’objet de la rencontre,
et la possibilité d’assistance du salarié.
Un délai de cinq jours ouvrables minimum doit séparer la réception de la convocation et la tenue de l’entretien.
L’entretien préalable
Cette étape est essentielle. Elle permet à l’employeur d’exposer les faits reprochés et au salarié de présenter sa défense. L’absence d’entretien prive la procédure de validité et peut entraîner la nullité du licenciement.
Notification du licenciement
L’article L1232-6 du Code du travail impose une lettre écrite et motivée, envoyée par recommandé. Elle doit :
exposer les faits reprochés,
qualifier la faute (grave ou lourde),
et expliquer pourquoi le maintien du salarié est impossible.
Le licenciement ne peut être notifié moins de deux jours ouvrables après l’entretien préalable.
Contester un licenciement pour faute grave
Le salarié peut saisir le conseil de prud’hommes dans un délai de 12 mois à compter de la notification (art. L1471-1).
Contrôle du juge
Le juge prud’homal vérifie :
la réalité des faits,
leur gravité,
et la proportionnalité de la sanction.
S’il estime que les faits ne justifient pas un licenciement immédiat, la rupture est requalifiée :
en faute simple, avec versement des indemnités ;
ou en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à des dommages et intérêts.
Indemnisation en cas de requalification
Selon l’article L1235-3, le salarié peut obtenir :
une indemnité compensatrice de préavis,
une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,
et des dommages-intérêts calculés selon son ancienneté et son préjudice.
Exemples jurisprudentiels de faute grave
La Cour de cassation illustre depuis plusieurs décennies les contours de la faute grave :
État d’ivresse sur le lieu de travail : faute grave en raison du risque pour la sécurité (Cass. soc., 22 mai 2002, n° 00-45.963).
Refus d’une consigne de sécurité : licenciement justifié (Cass. soc., 9 mars 2011, n° 09-70.619).
Vol d’un outil appartenant à l’entreprise : faute grave même pour une valeur minime (Cass. soc., 26 févr. 1991, n° 88-43.120).
Ces décisions confirment que la gravité est relative au poste, au contexte et à la confiance rompue.
Les indemnités en cas de licenciement pour faute grave
En cas de faute grave ou lourde
Le salarié ne perçoit pas :
l’indemnité légale de licenciement ;
ni l’indemnité compensatrice de préavis.
Il conserve :
le paiement de ses congés payés acquis,
le solde de tout compte correspondant aux sommes dues,
et le droit à l’assurance chômage (France Travail).
En cas de licenciement sans faute prouvée
Si le licenciement est requalifié, le salarié perçoit :
son indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,
son préavis payé,
et des dommages et intérêts selon le barème prud’homal prévu à l’article L1235-3.
À retenir
La faute grave justifie une rupture immédiate du contrat sans préavis ni indemnités.
Elle doit être établie par des preuves précises et objectives.
La procédure de licenciement doit être strictement respectée.
Le salarié conserve ses droits à l’assurance chômage.
En cas de contestation, le conseil de prud’hommes évalue la réalité des faits et la proportionnalité de la sanction.
Le licenciement pour faute grave illustre l’équilibre délicat entre le pouvoir disciplinaire de l’employeur et la protection du salarié. Il exige rigueur, transparence et preuves incontestables. Pour l’entreprise, une décision hâtive ou une procédure incomplète peut se transformer en contentieux coûteux. Pour le salarié, la connaissance des règles juridiques et la réactivité en cas de contestation sont essentielles pour faire valoir ses droits.
Le droit du travail français consacre ainsi une approche mesurée : sanctionner les comportements graves, sans jamais écarter le contrôle du juge, garant de la légitimité et de la proportionnalité de chaque licenciement disciplinaire.
Foire aux questions : Licenciement pour faute grave
Qu’est-ce qu’un licenciement pour faute grave ?
Le licenciement pour faute grave intervient lorsque le salarié adopte un comportement rendant impossible son maintien dans l’entreprise, y compris pendant la durée du préavis. Selon la Cour de cassation (Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43.867), la faute grave se caractérise par une violation des obligations contractuelles d’une gravité telle qu’elle rompt la confiance entre les parties. Elle se distingue de la faute simple, qui n’empêche pas la poursuite temporaire du contrat, et de la faute lourde, qui suppose une intention de nuire à l’employeur.
Quels sont les motifs pouvant justifier un licenciement pour faute grave ?
La faute grave repose sur des faits objectifs, prouvés et imputables au salarié. Les motifs les plus fréquents sont :
absences injustifiées ou abandon de poste,
insubordination ou refus d’appliquer une consigne légitime,
état d’ivresse pendant le service,
violences, injures ou menaces,
harcèlement moral ou sexuel,
vol ou fraude commis au détriment de l’entreprise,
divulgation d’informations confidentielles. Chaque cas est apprécié individuellement selon le contexte, le poste occupé et les conséquences pour l’entreprise.
Quelle est la différence entre faute simple, faute grave et faute lourde ?
Faute simple : manquement justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse, mais le salarié conserve ses indemnités et son préavis.
Faute grave : la gravité des faits rend le maintien du salarié immédiatement impossible, entraînant la rupture sans indemnité de licenciement ni préavis (art. L1234-5 du Code du travail).
Faute lourde : la gravité est aggravée par une intention de nuire à l’employeur. Elle prive également le salarié du paiement des congés payés.
Quelle procédure l’employeur doit-il respecter ?
La procédure de licenciement disciplinaire pour faute grave est définie par les articles L1232-2 à L1232-6 du Code du travail. Elle comprend plusieurs étapes obligatoires :
Mise à pied conservatoire si la présence du salarié est incompatible avec le service.
Convocation à un entretien préalable, par lettre recommandée ou remise en main propre.
Entretien contradictoire, au moins cinq jours ouvrables après réception de la convocation.
Notification du licenciement, au moins deux jours ouvrables après l’entretien, par lettre motivée précisant les faits reprochés. Le non-respect de ces règles peut entraîner la nullité du licenciement.
Quelles sont les conséquences d’un licenciement pour faute grave ?
Les effets sont immédiats :
Rupture du contrat de travail sans préavis,
Absence d’indemnité de licenciement et de préavis (art. L1234-5 du Code du travail),
Paiement du solde de tout compte pour les congés payés restants,
Droit au chômage auprès de France Travail (ex-Pôle emploi),
Mention du motif de licenciement sur le certificat de travail, sans détail des faits. Cette sanction, particulièrement sévère, doit être justifiée par des preuves irréfutables.
Peut-on contester un licenciement pour faute grave ?
Oui. Le salarié peut saisir le conseil de prud’hommes dans un délai de 12 mois (art. L1471-1 du Code du travail). Le juge vérifie trois critères :
la réalité des faits reprochés,
leur gravité au regard du poste,
la proportionnalité de la sanction. Si le juge estime que les faits ne sont pas établis ou insuffisamment graves, il peut requalifier le licenciement en faute simple ou en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié obtient alors ses indemnités et, le cas échéant, des dommages et intérêts pour préjudice subi.
Quelles indemnités sont versées après un licenciement pour faute grave ?
Le salarié licencié pour faute grave ne perçoit pas :
l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,
ni l’indemnité compensatrice de préavis. Il perçoit en revanche :
ses congés payés acquis,
son solde de tout compte,
et, sous conditions, les allocations chômage. Si le licenciement est jugé abusif, le conseil de prud’hommes peut accorder :
une indemnité compensatrice de préavis,
une indemnité légale ou conventionnelle,
et des dommages et intérêts selon le barème de l’article L1235-3 du Code du travail.
Quels exemples de fautes graves sont reconnus par la jurisprudence ?
La jurisprudence fournit plusieurs cas typiques de faute grave reconnue :
Cass. soc., 22 mai 2002 : salarié licencié pour ivresse sur le lieu de travail.
Cass. soc., 9 mars 2011 : refus de respecter les règles de sécurité (non-port d’un casque).
Cass. soc., 26 févr. 1991 : vol d’un bien appartenant à l’employeur.
Cass. soc., 27 sept. 2007 : violences physiques à l’encontre d’un supérieur hiérarchique. Ces arrêts confirment que la faute grave s’apprécie toujours en fonction du contexte et des responsabilités.
Quelles précautions doivent être prises avant un licenciement pour faute grave ?
Avant d’engager une procédure, l’employeur doit :
vérifier les faits et recueillir des preuves concrètes,
agir rapidement (dans un délai de deux mois après la découverte des faits, art. L1332-4),
respecter la procédure disciplinaire,
et rédiger une lettre motivée précisant les éléments reprochés. Pour le salarié, il est essentiel de conserver tout élément de preuve pouvant démontrer que la faute n’est pas caractérisée ou que la sanction est disproportionnée.