Lorsqu'un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, il dispose de la possibilité de contester l’avis médical devant le conseil de prud’hommes. Cette contestation, régie par les articles L. 4624-7 et L. 4624-8 du code du travail, doit être portée devant le juge selon une procédure accélérée au fond.
Cependant, il est important de souligner que ce recours n’a pas d’effet suspensif sur la décision d’inaptitude. L'employeur reste donc libre de procéder au licenciement sans attendre l'issue du litige.
La Cour de cassation l’a rappelé dans un arrêt récent[[Cass. soc., 19 mars 2025, n°23-19.813]] : l’exercice d'un recours contre l’avis d’inaptitude n'interdit pas à l'employeur de rompre le contrat de travail sur le fondement de cet avis.
La Haute juridiction confirme ainsi que la validité du licenciement s’apprécie à la date de son prononcé, et non à la date à laquelle le juge se prononce sur l’avis contesté.
Autrement dit, tant que l’avis médical est régulier et que l’employeur respecte ses obligations, la rupture du contrat de travail reste licite, même si ultérieurement l’avis est annulé.
L’article L. 1226-2-1 du code du travail prévoit une exception majeure :
Lorsque le médecin du travail précise, dans son avis d’inaptitude, que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement, l'employeur est dispensé de rechercher un autre emploi pour son collaborateur.
C’est précisément cette hypothèse qui était en cause dans l’arrêt du 19 mars 2025.
Le médecin du travail avait indiqué que l’état de santé du salarié empêchait toute proposition de reclassement. L’employeur était donc fondé à engager la procédure de licenciement sans rechercher un poste adapté.
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Même dans ce cas, l'employeur doit toutefois :
Le non-respect de ces formalités peut entraîner l’irrégularité de la procédure, sans remettre en cause la validité du licenciement sur le fond.
Lorsque l’avis d’inaptitude est annulé ultérieurement par le conseil de prud’hommes, cela n’entraîne pas automatiquement la nullité du licenciement.
La jurisprudence antérieure[[Cass. soc., 31 mars 2016, n°14-28.249]] et confirmée récemment[[Cass. soc., 19 mars 2025, n°23-19.813]] considère que le licenciement est seulement privé de cause réelle et sérieuse.
Cela signifie que :
La précision apportée par l’arrêt de 2025 est essentielle :
Même si le salarié obtient la requalification de son inaptitude (ex : il est jugé apte à un autre poste), le licenciement prononcé sur la base d’un avis dispensant de reclassement demeure valable à la date de sa notification.
L'employeur n’est donc pas exposé à une sanction lourde dès lors qu’il a respecté les prescriptions du médecin du travail au moment où il a licencié.
Afin d'éviter tout risque contentieux, l’employeur doit :
Il est recommandé d'agir dans un délai raisonnable après l'avis médical, pour éviter tout reproche lié à une inertie fautive.
Le salarié qui souhaite contester son avis d’inaptitude doit :
Il pourra, s’il obtient gain de cause, solliciter une indemnisation pour licenciement abusif, mais non la nullité sauf situation spécifique.
Le contentieux de la rupture du contrat de travail pour inaptitude continue de susciter de nombreuses interrogations.
La décision du 19 mars 2025[[Cass. soc., 19 mars 2025, n°23-19.813]] apporte une clarification utile : l'employeur n’a pas à suspendre la procédure de licenciement en cas de contestation de l’avis d’inaptitude et peut procéder à la rupture sans rechercher un reclassement, si l’état de santé du salarié fait obstacle à toute possibilité d’affectation.
Pour autant, une vigilance extrême doit être observée dans le respect des procédures et dans la documentation de chaque étape.
Salariés et employeurs doivent connaître précisément leurs droits et obligations pour sécuriser leurs démarches et éviter des contentieux lourds.