Le droit du travail ne prévoit pas que le salarié doive mettre à disposition son espace personnel pour exécuter son contrat. Selon l’article L. 1121-1 du Code du travail, toute atteinte à la vie privée du salarié doit être justifiée par les tâches à accomplir et proportionnée à l’objectif poursuivi.
⚖️ Par conséquent, en l’absence de circonstances particulières ou de consentement, l’employeur ne peut exiger que le salarié télétravaille depuis chez lui.
Lorsque l’entreprise sollicite explicitement le salarié pour qu’il effectue ses missions à domicile, la Cour de cassation considère qu’il s’agit d’une immixtion dans la vie privée, créant un droit à indemnisation.
La mise à disposition d’un espace privé pour des besoins professionnels doit alors être compensée financièrement, même en l’absence de clause spécifique.
Dans d’autres affaires, le salarié ne disposait d’aucun bureau dans les locaux de son employeur. La Cour a considéré qu’il était contraint d’exercer à domicile. Ce défaut de moyens équivaut à une contrainte et justifie une indemnité d’occupation.
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Par un arrêt remarqué du 19 mars 2025 (n° 22-17.315), la Cour de cassation a élargi son raisonnement en se référant pour la première fois au régime juridique du télétravail (article L. 1222-9 du Code du travail), même si cette notion n’était pas expressément en cause dans le litige.
Elle en tire une règle générale : le fait que le salarié télétravaille de manière convenue, même partielle, justifie une indemnité pour l’occupation de son domicile, sauf si un poste de travail lui a été proposé et refusé.
Cette position a été confirmée quelques jours plus tard dans l’arrêt du 2 avril 2025 (n° 23-22.158).
📌 Ces décisions suggèrent que le simple accord sur le télétravail pourrait suffire à ouvrir droit à indemnisation, sans que le salarié ait à démontrer une demande explicite de l’employeur.
L’arrêt du 4 décembre 2013 (n° 12-19.667) précise une limite importante : lorsqu’un salarié choisit de télétravailler alors qu’un bureau est disponible dans l’entreprise, il ne peut prétendre à aucune indemnité d’occupation.
L’argument repose sur la logique du consentement : le salarié assume volontairement l’utilisation de son domicile, ce qui exclut toute compensation.
L’article L. 1222-11 du Code du travail prévoit que, dans certaines situations (épidémie, menace grave, force majeure), l’employeur peut imposer le télétravail sans accord préalable.
Dans ce cas, le salarié ne choisit pas librement cette modalité d’organisation. La jurisprudence ne s’est pas encore prononcée clairement, mais une demande d’indemnisation pourrait être recevable au titre de l’absence de local professionnel et de l’immixtion dans la vie privée.
Il est essentiel de bien distinguer :
💡 Ainsi, un salarié peut être indemnisé à deux titres différents :
→ d’une part, pour ses dépenses ;
→ d’autre part, pour la mise à disposition de son espace privé.
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Le salarié doit démontrer :
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L’indemnité d’occupation du domicile en cas de télétravail est désormais reconnue par la jurisprudence, même dans les cas où le télétravail résulte d’un simple accord.
Toutefois, elle ne s’applique ni de manière automatique, ni lorsque le télétravail est choisi de façon unilatérale par le salarié.
Les conditions de fond (accord, absence de local) et les preuves concrètes restent indispensables pour faire valoir ce droit.
Pour les employeurs, cela suppose de formaliser rigoureusement la mise en place du télétravail, et pour les salariés, de documenter leur situation avec précision.